Voyageur sans voie
de Gültekin
Editeur : APIC EDITIONS
Date de parution : 3-/-0/2022
9789931468950
Réimpression - 15.00 €
Résumé
SEPT QUESTIONS A GÜLTEKIN EMRE 1/ Une autobiographie en quelques mots. Je suis né à Konya en Turquie. Quand j’avais trois ans et demi j’ai perdu mon père qui était marchand ambulant de livres. J’ai étudié la langue et la littérature russe à la faculté de langues, géographies et histoires à l’Université d’Ankara. En 1977 mon premier poème est publié. J’ai travaillé comme rédacteur, durant six mois dans deux maisons d’édition et quatre ans et demi à la bibliothèque nationale à Ankara. En 1980 je me suis installé à Berlin. Je suis parti à la retraite après trente ans d’enseignement. Je consacre mon temps pleinement à la littérature et à l’écriture. 2/ Comment répondre à une injonction brusque : « Définissez la poésie. » Il n’est pas facile de définir d’emblée la poésie. Quel poète peut-il le faire ? Pour moi, la poésie, c’est la vie elle-même. Les mille et un détails de la vie constituent le matériel pour la poésie. Imaginons tout ce que nous vivons dans une journée ; les vagues à l’âme, les émois, les déceptions… Les agitations politiques et sociales, les injustices dans le monde… Tout ce que nous vivons vient se réfugier dans les images. Tout ce que nous ne pouvons pas vivre et nos rêves prennent aussi une place dans la poésie. Bien entendu, notre enfance aussi. Puis, nos souvenirs, nos amours, nos retrouvailles, nos séparations… Nous exprimons également la mort de ceux qui nous sont chers, nos souffrances. La nature, les agitations saisonnières font leurs effets sur nous et nourrissent la poésie. Les bribes de vie qui ne disparaissent pas et qui dorment tout simplement dans notre subconscience germent dans la poésie. L’histoire, la géographie, les différences culturelles, les espaces… accompagnent aussi la poésie. Chaque domaine de la vie est dans le domaine de la poésie. C’est-à-dire la poésie est la vie elle-même. Ce qui constitue le langage poétique, le contenu poétique, c’est la vie.. 3/ Prose et poésie, la distinction a-t-elle un sens ? La poésie est un chêne millénaire qui nourrit tous les autres arts. Elle est très fertile. En partant d’elle-même, elle couvre la toile avec les dessins, les couleurs du peintre. Quand nous disons, « C’est une peinture comme une poésie. » nous évoquons la fraternité entre la peinture et la poésie. C’est pareil quand il s’agit d’un roman qui parle de la vie, de l’amour, de l’homme et de la femme avec un style poétique. Les images qui nourrissent cette forme monte le niveau esthétique du roman, le rend plus lisible. On peut dire la même chose pour les nouvelles où l’air poétique circule dans les phrases. Ce qui nous permet de les qualifier, « unique », « très beau », « fluide ». Pour donner un exemple, voici les nouvelles de Tchekhov. Je pense pareil pour les essais aussi. La particularité formelle entre la prose et la poésie disparaissent petit à petit. Parfois il est difficile de distinguer une poésie d’un récit. Les poèmes en proses d’Aloysius Bertrand dans « Caspard de la nuit » ne sont-ils pas à la fois proses et poèmes ? 4/ De la forme (et du formel) en temps de crise. La forme est le corps de la poésie, son apparence, son habit. Chaque forme nait en même temps que la poésie. Cette dernière ouvre ses yeux au monde avec sa forme. Le poète ne fait qu’arranger celle-ci. Il jette ce qui coince, il polit, il rajoute ce qui manque etc. L’équilibre entre le fond et le contenu est très important. Donc on adapte l’habit au corps. Pour ma part la forme n’a jamais primé sur le fond. Le premier vers de mon poème a défini sa forme, son chemin, son but aussi. Les formes superficielles qui ne reflètent pas l’âme de la poésie sautent aussitôt aux yeux attentifs. Des recherches formelles qui sont bien éloignées du monde interne de la poésie se trouvent la plupart du temps chez les poètes apprentis. Dans une poésie qui n’a pas trouvé une bonne forme, peu importe qu’elle soit rythmée, rimée ou libre, le thème devient fade. C’est parce que la forme appartient au langage poétique spécifique. C’est pourquoi la différence de formes d’une épopée à un compte, d’une poésie populaire au sonnet, de la poésie expérimentale à la poésie traditionnelle des pays…. 5/ Quel avenir pour la poésie ? Souvent on aborde beaucoup plus le sujet d’avenir de la poésie que celui d’autres arts. Je m’étonne toujours quand j’entends ces genres de propos : « La poésie est morte », « la poésie est finie », « on ne lit plus la poésie » … L’attaque de la technologie moderne, de l’internet contre la poésie est aussi permanente que contre d’autres genres. Mais seulement l’avenir de la poésie est mis en cause. Il est vrai que l’avenir de notre monde est un grand point d’interrogation. Si le monde est fini, ce n’est pas seulement la poésie qui sera morte, mais d’autres genres aussi. Si l’art existe c’est parce que l’homme existe. Tant que l’homme existera, la poésie aussi. La poésie c’est la vie. La vie d’un homme sans la poésie n’est pas concevable pour moi. Elle est présente, d’une façon ou d’une autre, dans la vie de chaque individu. Si nous disons « comme une poésie » pour une belle femme, pour un beau paysage, pour une journée inoubliable, pour le coucher du soleil, pour un film que nous venons de regarder… comment l’avenir de l’avenir de la poésie peut-il être mis en cause ? Bien que la poésie plonge dans des formes différentes, elle est toujours ouverte aux nouveautés. C’est ce qui fait sa force. Dans l’avenir elle prendra surement d’autres formes mais elle existera toujours. 6/ La part de la prosodie dans l’élaboration du poème. La conception de la poésie varie d’un poète à l’autre, ce qui est normal. La poésie d’un Maïakovski et d’un Lorca peut-elle être pareil ? Celle d’un Aragon et celle d’un Neruda ? Celle de Nazim Hikmet et celle d’un poète africain, asiatique ou européen ? Chaque poète trouve sa forme d’expression, son langage poétique. Certains ont un langage plus simple que celui d’autres. Certains s’appuient sur des images, comme Ungaretti ou Paz, difficiles à saisir. Certains essaye l’épopée, comme Nazim Hikmet, alors que d’autres essayent d’atteindre une expression moderne tout en avançant sur le chemin traditionnel de la poésie. Certains utilisent le haiku. Ce qui importe est de trouver la meilleure forme et l’efficacité pour exprimer quelque chose. Ils peuvent utiliser la poésie avec une limpidité, comme Brecht, comme un moyen de connaissance, de motivation, d’orientation, de pensée ou comme Maïakovski, comme un moyen de résistance. Il suffit que le poète sache comment aborder ses thèmes. Bien entendu, la prosodie rend la poésie plus pénétrable, saisissable, efficace. C’est le point commun chez les grands poètes. 7/ La place de la traduction dans l’écriture poétique. La traduction est une action d’écriture non négligeable. Quand j’avais traduit du russe le livre de Maïakovski, intitulé 150 000 000, je savais qu’il ne suffisait pas connaitre une langue pour faire la traduction. Il ne suffit non plus que le traducteur aime la poésie. Il faut que le traducteur maitrise aussi le langage poétique qu’il traduit. Si la traduction n’existait pas nous n’aurions pas connu les poètes d’autres pays. Le chef d’œuvre de Neruda, Canto General, est finalement et heureusement traduit en turc 70 ans après sa publication. C’est la traduction qui permet de faire connaitre la poésie dans d’autres langues et cultures. Elle permet par là de former les poètes de jeunes générations.
Fiche technique :
Editeur
APIC EDITIONS
Contribeurs
Emre
EAN
9789931468950
Date de parution
3-/-0/2022
Nombre de pages
148 pages
Poids
0.150 Kg
Hauteur
19 cm
Largeur
14 cm