Siège passager
de Alaa
Editeur : APIC EDITIONS
Date de parution : 7-/-0/2024
9789969525137
Disponible - 17.00 €
Résumé
SEPT QUESTIONS A ALAA KHALID 1/ Une autobiographie en quelques mots. Alâa Khalid est né à Alexandrie en 1960. Il est diplômé de la faculté des sciences de l’université d’Alexandrie en 1982. Depuis 1999, il publie et édite la revue « Amkina » (Lieux) avec la photographe et artiste Salwa Rachad. Cette revue a pour objet la culture du lieu. Le poète et écrivain Mahâb Nasr, avait pris part aux premiers numéros. Il a huit recueils de poésie dont le dernier, Le néant aussi est un lieu de nostalgie, a été publié par l’Autorité générale du livre du Caire en décembre 2022 ; quatre romans dont le dernier, Le labyrinthe d’Alexandrie, est paru chez Dâr as-Shurûq au Caire en 2021 ; trois ouvrages sur la littérature de voyage parus chez Dâr as-Shurûq et Dâr as-Sharqiyyât ; quatre ouvrages en prose à mi-chemin entre l’autobiographie et la critique littéraire. 2/ Comment répondre à une injonction brusque : « Définissez la poésie. » Pendant mon périple d’écriture poétique avec laquelle a commencé mon périple avec la littérature, une relation fluctuante est née avec la poésie. Sa présence, puis son absence, puis sa présence et ainsi de suite. Il y a toujours un iceberg immergé qui est seul à décider du moment de son apparition. Au départ, la poésie était le moyen de s’exprimer sur soi et de dire « la vérité ». Son principal moteur était à quel point elle était proche de la vie, de ses détails, jusqu’à se transformer avec le temps en de rares archives du quotidien. Mais bien sûr, à l’intérieur d’un contexte d’idées et de concepts auxquels je croyais à ce moment-là. Pendant les années où l’écriture de la poésie s’est arrêtée et qui a duré, peut-être cinq ou six ans ; je n’ai pas écrit une seule ligne. Comme si je redevenais illettré et que je ne connaissais pas les alphabets de ce monde. Puis un jour, le sommet de l’iceberg a commencé à poindre, j’ai commencé à glaner des signes pour des phrases qui bourdonnaient dans ma tête et une série de poèmes s’est mise à se succéder, comme si cet iceberg s’était formé une nouvelle fois et pouvait à présent flotter. Ce processus s’est répété environ cinq ans tout au long de ma vie avec la poésie qui s’est poursuivie plus d’une trentaine d’années. Cependant, à force, la crainte que la poésie ne se moque de moi a disparu, parce que je sais qu’il y a quelque chose qui se forme, des visions qui massèrent et une transposition quelconque en attente d’apparaître. Peut-être que ces interruptions constituaient le rythme du temps poétique en moi, ou bien le rythme de la vie d’une autre manière. La vie dont je cherchais les détails et en me les donnant, elle m’a donné ce rythme où elle vit. La vie a une autre révolution qu’elle effectue en tournant à l’intérieur du monde la poésie et des sens. Durant tous les moments de désespoir que je ressentais, où j’ai souvent décidé que je n’écrirai plus de poésie ou que la poésie de m’écrira plus, la poésie était tournée dans l’autre direction, en train de regarder mon navire en mer contre lequel elle risquait de se heurter. Peut-être est-ce la vie qui prit de nouveaux sens pendant mon périple avec la poésie, quittant les détails pour se mettre à la recherche de la structure ou de la forme qui la distingue. En effet, la structure ou la forme c’est ce qui donne le tempo, c’est ce qui guide le conscient et l’inconscient ensemble. Jusqu’à présent, elle ne m’a pas trahi. Je lui fais confiance parce qu’elle a préservé mon identité poétique, malgré ses interactions avec d’autres identités et d’autres manières d’écrire. 3/ Prose et poésie, la distinction a-t-elle un sens ? Il n’y a pas de distinction entre la poésie et la prose parce qu’en un sens, elles obéissent à une loi plus grande qui les anime, à savoir l’âme de la poésie. Je crois que l’écriture, sous toutes ses formes, est partie de ce lieu sacré. Ce paradoxe qui a fait que le langage dévie de ses origines pour exprimer ce niveau d’expression nouveau et inouï. L’âme de la poésie est l’origine qui s’est propagée dans de nombreuses et diverses formes d’expression. Pendant les périodes où l’écriture de la poésie s’est interrompue, elle lui trouvait d’autres échappatoires dans l’écriture de la prose. Cependant, même ainsi, elle ne s’est pas complètement diluée dans la prose. Peut-être a-t-elle pris une nouvelle version à l’intérieur de la prose, car il y a une différence entre l’âme de la poésie et le fait poétique. Ce qui s’est glissé vers la prose c’est l’âme de la poésie, tandis que le fait poétique avec lequel j’ai inauguré mes écritures avec la poésie, il n’en a jamais trop fait ni ne s’est perdu dans d’autres expériences. Ce « fait » a façonné la structure à travers laquelle la poésie peut apparaître, comme si la poésie créait sa propre coïncidence avec elle-même et non d’un autre contexte. 4/ De la forme (et du formel) en temps de crise. Peut-être que la crise humaine que nous vivons tous désormais et qui menace la poésie en ceci qu’elle menace le moi de l’Homme et réduit sa liberté, peut-être que cette crise a généré un enchevêtrement des formes, des structures et des genres d’expression poétique. Bien plus, elle a créé de nouvelles formes, à mi-chemin entre le conte et la poésie, entre le journalisme et la poésie, entre la poésie et la musique. Si bien que d’autres critères se sont ajoutés à son essence, afin de prendre le dessus sur ce moi contracté du fait de la crise. En ce qui me concerne, avec le temps et beaucoup de lacunes qui ont imprégné ma relation avec elle, le concept de « Vérité » s’est transformé, de même que s’est transformé mon concept de moi-même. La poésie s’est emmêlée avec des formes narratives qui inclinent vers le conte ou la narration. Cette construction narrativo-dramatique a fait en sorte que la poésie concentre son devenir sur la forme. Cet événement dramatique attend de flotter à sa surface, même si la poésie se trouve toujours au-delà des événements, des faits, et n’attend aucune histoire dans laquelle elle prendrait forme. J’ai commencé ces dernières années à tendre vers cette mystérieuse quintessence poétique qui cède plus à une intuition poétique et est loin d’un événement de vie en particulier. Peut-être que la mémoire enfantine s’est vidée, ou que son espace de révélation, de vérité, s’est heurté aux obstacles de la langue, du tabou et du normal ; ou du rétrécissement de la possibilité d’expression en raison de la crise humaine. La révélation s’est ainsi vidée de l’énergie de la culpabilité, de la transgression ou de la capture symbolique et iconique de la sphère privée. C’est pourquoi je me suis plus dirigé vers des espaces baignés dans l’ambiguïté existentielle qui sort d’un autre réservoir, autre que la mémoire de l’enfance. Peut-être est-ce le réservoir de la culture elle-même, dans l’une de ses représentations et son lourd héritage humain à l’instant où elle croise l’existence personnelle. 5/ Quel avenir pour la poésie ? Maintenant, partout dans le monde, la poésie est isolée et vit seulement des bourses dans les académies et les universités. Rien ne représente une poétique mondiale malgré la globalisation de la vie aujourd’hui. Mais c’est une globalisation qui ne forge aucun modèle humain. L’idée/ la référence commune se dissout au milieu de cette fragmentation de la vie malgré les nombreux abonnements à l’initiative des médias, mais la plupart ne sont que consommation. Cette fragmentation s’est reflétée sur la poésie et à présent, le poète, en dépit de ses liens avec le monde, est isolé. Ainsi, il y a un récit d’une expérience personnelle sans la moindre référence, intérieure ou extérieure, pleine de peurs et un flou quant à l’avenir et peut-être même une rupture avec le passé. Une expérience personnelle suspendue qui ne vit peut-être qu’à l’intérieur de la langue. 6/ La part de la prosodie dans l’élaboration du poème. Je crois que la prosodie est aujourd’hui très différente du passé. Ce n’est plus cette parole de mesures et de rimes, mais elle a une autre place. C’est comment préserver le rythme à l’intérieur du poème, à travers des formes répétées et diverses d’idées, et des manières de les formuler à l’intérieur de chaque poème. Peut-être que ce « rythme » est l’équivalent de l’ancienne prosodie et qui aujourd’hui se trouve à l’intérieur d’une large surface expérimentale. Par exemple, parfois, en libérant la langue de l’éloquence en la transformant en surface transparente révélatrice de sens. Bien sûr, il y a plusieurs façons selon la vision de chaque poète, mais toutes dépendent d’un effort organisé afin de transcender la surface de la langue en direction du sens. C’est pourquoi la poésie est à présent à même d’être traduite d’une langue à l’autre ; le sens est devenu flottant avec la surface de la langue ou se tient à proximité. 7/ La place de la traduction dans l’écriture poétique. Je pense que le rôle de la poésie aujourd’hui, dans cet instant de fragmentation que l’on vit, est d’unifier ou de créer un commun mondial et universel, ce que la culture globalisée n’a pas réussi. Peut-être parviendra-t-elle à relier de nouveau ces existences humaines à la fois unies et désunies sur un commun plus grand qui n’est pas la globalisation. Peut-être que la globalisation a forgé un monde unique, mais ses disparités sont grandes et chacun vit sa globalisation à sa façon. C’est pourquoi la traduction peut guetter cette pulsation différente de l’impact de la globalisation, afin de créer une universalité nouvelle, résistante, à travers laquelle le moi poétique, où qu’il soit, peut voir qu’il n’est pas à l’écart, ou seul face à la crise. Peut-être que cela redonnera au poète foi en l’avenir.
Fiche technique :
Editeur
APIC EDITIONS
Contribeurs
Khalid
EAN
9789969525137
Date de parution
7-/-0/2024
Nombre de pages
156 pages
Poids
0.190 Kg
Hauteur
19 cm
Largeur
14 cm